De l’ordonnance rendue le 9 avril 2020, il en résulte que :
- l’obligation de l’employeur d’évaluer les risques professionnels et d’adapter ses modes de fonctionnement est renforcée en période exceptionnelle de pandémie,
- le DUER doit être actualisé et porté à la connaissance des salariés,
- l’activité de l’entreprise ne peut se poursuivre qu’à la condition que les mesures de protection aient été prises en réponse à l’évaluation des risques professionnels.
Ci-après une analyse plus détaillée de la décision.
Concernant les mesures prises par La Poste
Mesures alléguées par La Poste | |
Désignation de cellules afin de réfléchir et travailler sur les mesures de prévention |
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Mesures de concertation avec les représentants du personnel |
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Information des salariés |
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Risques psychosociaux |
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Fourniture de gel hydroalcooliques et de masques |
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Désinfection des locaux |
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Mesures permettant de faire respecter les gestes barrières |
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Désignation d’équipes de salariés chargées de faire respecter les mesures sanitaires |
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Mesures en cas de contamination d’un salarié, suspectée ou avérée |
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Organisation du télétravail |
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Réduction de l’activité aux missions définies comme essentielles |
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Interdiction et annulations de certains déplacements à l’étranger |
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Analyse du Tribunal Judiciaire
- Le TJ juge ces mesures adoptées suffisamment substantielles, variées et concrètes tout en se montrant aisément adaptées et déclinables aux divers échelons locaux et en s’insérant dans le cadre légal de l’obligation spécifique de santé et de sécurité prévues par les dispositions légales.
- Le TJ relève même que « ce dispositif fragmenté et successif commence avec beaucoup de réactivité dès le début et parfois même en anticipation de cette crise sanitaire ».
- Le TJ constate également que la société a adopté l’ensemble de ces mesures de précaution et de prévention :
-en appliquant et complétant concrètement et localement les diverses directives et recommandations des pouvoirs publics et des autorités sanitaires,
-en se concertant avec les CHSCT ou les CNSST, et en prenant avis auprès du médecin coordinateur des services de santé au travail et de son groupe de réflexions constitué de quinze médecins.
- Le Tribunal Judiciaire rejette la demande du syndicat de procéder à un recensement des personnes contaminées, compte tenu :
-de la légalité suspecte d’une telle mesure au regard du respect des impératifs de protection de la vie privée et des collectes de données de santé, qui demeurent sous l’emprise du RGPD et du Code de la santé publique ainsi que sous l’autorité prudentielle des autorités publiques sanitaires et le contrôle de la commission nationale informatique et libertés (CNIL),
-de la fiabilité très relative du traitement traitement et la communication de telles données, même anonymisées, compte tenu des risques connus de sous-estimation du fait des formes asymptomatiques ou avec peu de symptômes, ou de surestimation en raison du parti pris probabiliste suivant lequel toute personne présentant des symptômes doit être considérée comme malade,
-de l’absence de moyens pour l’employeur de connaitre les motifs d’un arrêt de travail pour cause de maladie, étant rappelé qu’il n’a en outre pas le droit d’interroger les salariés à ce sujet.
Concernant le Document Unique d’Evaluation des Risques (DUER)
Documents produits par La Poste | Analyse du Tribunal judiciaire |
Un document « Questions réponses » diffusé par la Direction des ressources humaines |
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Un document annexe de La Poste intitulé « Risque BIOLOGIQUE – Evaluation des risques professionnels CNMR – Pandémie coronavirus sur le territoire national » en date du 26 mars 2020 |
– Les risques liés à l’éloignement pour les personnes placées en télétravail en raison de l’épidémie – Le risque de contamination du personnel par contact avec des personnes porteuses du virus et par diverse situations dans un site en PCA sans relation en face à face avec la clientèle – Le risque d’infection du fait d’un possible contact avec une personne malade sur le même lieu de travail – Les risques liés aux incivilités externes accrues du fait de l’adaptation des procédures ou de l’organisation du travail ainsi que des fermetures des bureaux de poste – Le risque consécutif à la baisse du taux d’accessibilité au téléphone pouvant générer des appels conflictuels de la part des clients – Les risques afférents aux incivilités internes ainsi qu’au stress résultant de manière générale de la peur de l’épidémie
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Préconisations du Tribunal judiciaire | |
§ Le Tribunal rappelle :
Ø Que la production d’informations largement réservée au personnel de direction n’est pas à même de se substituer à cette obligation d’information à l’intention de l’ensemble du personnel. Ø Que cette obligation d’information s’inscrit dans la démarche même de prévention à laquelle doivent être associées les IRP et le médecin du travail, outre les personnels salariés eux-mêmes (dans la mesure du possible). § Le tribunal ordonne à La Poste d’établir, et de diffuser dans les meilleurs délais, un DUER selon les consignes suivantes :
o Le recensement de l’ensemble des activités postales estimées essentielles et non essentielles à la vie de la Nation ; o Les conditions d’exercice liées à l’épidémie de covid-19 des divers métiers et emplois des activités postales essentielles à la vie de la Nation ; o Les incidences de l’arrivée annoncée le 1er avril 2020 de volontaires des services support, de salariés de la société MEDIAPOST, d’intérimaires et de salariés en Contrat à durée déterminée (CDD) au sein des services pour étendre la distribution de la presse, du courrier et des colis ainsi que l’ouverture de ses bureaux à compter du 6 avril 2020 ; o Les mesures adoptées dans les cas d’infections signalées, qu’elles soient avérées ou suspectées, tant en ce qui concerne les personnels qu’en ce qui concerne les locaux et les mobiliers professionnels ; o Les risques psychosociaux résultant spécifiquement de l’épidémie de Covid-19 § Le tribunal constate et ne formule aucune remarque sur la méthode de production du DUER de La Poste :
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