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Loi santé travail : quelles incidences en matière d’interventions d’entreprises extérieures ?

Le 31 mars 2022, la loi santé-travail est officiellement entrée en vigueur, accompagnée d’une publication au compte-goutte des décrets d’application.

Si la loi ambitionne de promouvoir la prévention primaire des risques professionnels en entreprise, force est de constater que la réforme s’est assez peu intéressée à la question des interventions d’entreprises extérieures et des risques dits de « coactivité ».

Si les exigences en matière d’évaluation des risques propres à chaque entreprise se trouvent renforcées tant sur le fond que sur la forme avec notamment l’obligation d’établir un PAPRIPACT ou une liste de mesures d’action selon les cas, le cadre juridique applicable aux plans de prévention (PDP *), de nature réglementaire, reste quant à lui inchangé.

* acronyme à ne pas confondre avec celui de la Prévention de la Désinsertion Professionnelle qui occupe une place importante dans la réforme.

Le sujet est pourtant essentiel en pratique, notamment sur la question de l’analyse des risques d’interférences entre activités, installations et matériels.

Il convient de noter ici que si la réforme prévoit une obligation de conservation 40 ans minimum des « générations » successives de DUERP à compter du 31 mars 2022, via prochainement un dépôt en ligne obligatoire sur le portail numérique dédié, cela ne s’appliquera pas aux PDP.

Si l’objectif est d’améliorer la traçabilité collective des expositions au travers des DUERP, il n’est pas question d’alourdir encore plus la tâche administrative des entreprises en y ajoutant les PDP, souvent très nombreux pour une même entreprise utilisatrice !

En revanche, on peut imaginer que le futur passeport de prévention pourra présenter un intérêt particulier en matière de formations pour les salariés d’entreprises extérieures, mais les contours du dispositif restent encore à définir.

Toujours dans le prolongement de l’ANI du 9 décembre 2020, la loi a par ailleurs mis en place un dispositif visant à améliorer l’efficience des services de prévention et de santé au travail vis-à-vis de certaines populations de travailleurs : travailleurs indépendant et chefs d’entreprise, travailleurs temporaires et salariés des entreprises extérieures intervenantes.

C’est finalement sous cet angle que la réforme aborde le plus directement la question des interventions d’entreprises extérieures.

Selon les signataires de l’ANI, « lorsque les salariés d’entreprises sous-traitantes ou prestataires d’entreprises extérieures interviennent sur le site d’une entreprise utilisatrice dotée d’un SSTA, que la nature et la durée des prestations le justifient, ce SSTA et le SSTI auquel adhère l’entreprise extérieure, doivent organiser leur collaboration en matière de prévention. Les conditions de mise en œuvre de cette collaboration doivent être précisées » (cf. art. 3.1.4.3.).

Sur cette base, la prévention de certains risques professionnels auxquels sont exposés les salariés d’une entreprise extérieure doit dorénavant être assurée de manière conjointe dans le cadre d’une convention conclue entre le SPST autonome de l’entreprise utilisatrice et le SPST dont relèvent ces salariés (C. Trav., L4622-5-1 nouveau).

Ces modalités viennent d’être précisées par un décret n° 2022-681 du 26 avril 2022 (cf. C. Trav., D. 4625-34-1 nouveau, applicable à compter du 28 avril 2022).

Cette convention de collaboration conjointe devra être mise en place dans 2 cas :

  • lorsque l’intervention au sein de l’entreprise utilisatrice revêt un caractère permanent,
  • ou si tel n’est pas le cas, lorsque l’intervention à réaliser par les entreprises extérieures répond à la double condition suivante :

Un volume d’heures de travail prévisible (y compris heures des entreprises sous-traitantes) supérieur ou égal à 400 heures sur une période inférieure ou égale à 12 mois, ou s’il apparaît en cours d’exécution des travaux que le nombre d’heures de travail doit atteindre 400 heures ( * Observons ici que ce champ s’inspire en partie de l’article R4512-7 relatif à l’établissement obligatoire d’un PDP par écrit).

ET une exposition du(des) travailleur(s) extérieur(s) :

  • soit à des conditions du travail de nuit,
  • soit à des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité ou pour celles de ses collègues ou des tiers évoluant dans l’environnement immédiat de travail en référence au périmètre du suivi individuel renforcé (cf. exposition à l’amiante, plomb, agents CMR, agents biologiques de groupe 3 et 4, rayonnements ionisants, risque hyperbare, opérations de montage et de démontage d’échafaudages avec risque de chute de hauteur ; mais également postes soumis à examen d’aptitude spécifique et postes inscrits par l’employeur sur la liste des postes à risques particuliers).

Il convient de noter que cette convention de collaboration inter-SPST couvre l’essentiel du spectre d’actions dévolu aux SPST, à l’exception de la surveillance de l’état de santé des travailleurs extérieurs.

Il convient de préciser toutefois que selon l’article L4622-5-1 du Code du travail (1er alinéa), lorsqu’une entreprise dispose de son propre SPST autonome, celui-ci « peut assurer, dans des conditions fixées par convention, le suivi individuel de l’état de santé des travailleurs, salariés ou non-salariés, qui exercent leur activité sur le site de l’entreprise ».

Il convient d’articuler cela avec les règles applicables en matière de suivi individuel de l’état de santé des salariés pendant l’exécution des opérations, qui prévoient des modalités de coopération spécifiques sur une base contractuelle entre les entreprises en présence et leurs SPST (cf. C. Trav. R4513-9 et s.).

R4513-12 prévoit ainsi notamment que « par accord entre les chefs de l’entreprise utilisatrice et de l’entreprise extérieure et les médecins du travail intéressés, le suivi individuel de l’état de santé (…), peut être réalisé par le médecin du travail de l’entreprise utilisatrice pour le compte de l’entreprise extérieure. Cet accord peut également prévoir que le médecin du travail de l’entreprise utilisatrice et, le cas échéant, les autres membres de l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail, mènent les actions sur le milieu de travail prévues aux articles R4624-1 et suivants pour le compte des salariés de l’entreprise extérieure. (…) »

Il s’agit d’une faculté ; et même si le texte n’établit pas de distinction, ce type d’accord pluripartite semble en pratique plus adapté lorsque l’entreprise utilisatrice ou cliente dispose de son propre SPST autonome (à moins que les entreprises n’adhèrent toutes au même SPST interentreprises), avec en arrière-plan, une discussion inévitable sur l’incidence financière d’un tel mode de fonctionnement …

 

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