Ces derniers jours, des salariés du Musée du Louvre ou des chauffeurs de l’Essonne ont exercé leur droit de retrait, invoquant le manque de matériel de protection (gel, masque, …).
Prévu à l’article L 4131 du Code du travail, le droit de retrait permet à un ou plusieurs salariés de se retirer après en avoir alerté leur employeur par quelque moyen que ce soit, même s’il est préférable de garder une trace écrite de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que toute défectuosité qu’il constate sur les systèmes de protection.
L’employeur doit alors prendre les mesures nécessaires pour que la sécurité du ou des salariés soit de nouveau assurée et qu’ils puissent reprendre le travail.
Pendant ce temps, aucune retenue de salaire ne peut être prise contre le salarié.
Le droit de retrait recoupe donc deux notions juridiques qui sont le droit d’alerte et le droit de retrait.
Ce droit doit donc être apprécié au cas par cas.
Au stade de l’épidémie à ce jour, si le droit d’alerte peut être légitime et apprécié au cas par cas, le droit de retrait n’est pas fondé dès lors que les entreprises appliquent bien toutes les précautions édictées par le Ministère de la Santé.
En effet, le droit de retrait n’est pas subordonné à l’existence réelle d’un risque mais à l’existence d’un motif raisonnable de penser que le risque existe.
En d’autres termes, le droit ne peut pas s’exercer à l’égard de toute situation de risque potentiel (contact d’un public potentiellement infecté).
Il s’exerce au contraire dans l’urgence face à un risque immédiat qui, sans être nécessairement certain, demeure objectif et tangible.
De plus, le droit de retrait est un droit qui demeure exceptionnel et non subsidiaire dans la mesure où le ou les salariés doivent tenir compte :
- de la gravité du risque au regard de la nature même du travail qui lui est demandé et les risques que le travail comporte,
- de la réalité du risque et des mesures de prévention mises en œuvre ou susceptibles de l’être à l’égard de ce risque.
En matière de coronavirus, le droit de retrait ne peut pas être la première réponse à une situation exposant à une contamination potentielle.
Il ne peut, à mon sens, être exercé que si le salarié a une raison objective de penser que les mesures prises ou pouvant l’être sont insuffisantes et qu’il n’a pas d’autres choix que d’exercer son droit de retrait pour éviter la contamination.
Ainsi, il convient impérativement, pour paralyser toute tentative des salariés de l’exercice de leur droit de retrait que l’employeur ait informé les salariés sur la réalité du risque (conditions de la contamination possible) et sur l’étendue à l’échelle des mesures prises et adoptées pour éviter la contamination.
Une mauvaise information peut rendre en effet plus excusable une erreur d’analyse de la part des salariés.
Il appartient également à chaque employeur de procéder au plus vite à l’information des représentants du personnel des mesures de prévention adoptées (fourniture de masque et de gel) et des décisions qui pourraient être prises en cas de signalisation d’un cas de contamination.
De plus, il est conseillé, en cas de situation plus grave, de réunir d’urgence les représentants du personnel pour évoquer avec eux les mesures complémentaires qui pourraient être prises.
Ces mesures de sauvegarde seront de nature à paralyser le droit de retrait et à justifier, le cas échéant, lors d’un droit de retrait, la saisine par l’employeur du juge des référés pour justifier de la retenue sur salaire des salariés ayant en fait abandonné leur poste sans justification.