A l’image de nos voisins européens, le gouvernement français a pris la décision de mettre en place le prélèvement de l’impôt à la source.
Vaste sujet qui, si on ne s’y intéresse pas de près, peut très vite sembler complexe. Pour vous, nous avons fait le tour des points essentiels à retenir avant l’entrée en vigueur prévue le 1er janvier 2019.
Pourquoi le Gouvernement souhaite-t-il mettre en place le prélèvement de l’impôt à la source ?
Actuellement, l’impôt est étalé sur 10 mois, de janvier à octobre, pour les personnes qui sont mensualisées.
Au 1er janvier 2019, le prélèvement de l’impôt à la source sera étalé sur 12 mois, et s’adaptera automatiquement aux revenus perçus.
L’objectif est avant tout de supprimer le décalage d’un an qui existe entre le versement des revenus et l’impôt appliqué.
En effet, en 2018, vous payez des impôts sur vos revenus de l’année 2017.
Pour beaucoup de salariés, il s’agit donc d’anticiper une éventuelle perte de salaire ou des frais conséquents pour ne pas se retrouver « dans le rouge ».
Grâce à cette réforme, chaque changement de situation financière ou familiale aura un impact quasi instantané et permettra d’adapter le montant de l’impôt prélevé.
Chaque salarié paiera donc en fonction de sa rémunération perçue dans le mois.
Que signifie concrètement le prélèvement de l’impôt à la source ?
Pour faire simple, à partir de 2019, votre employeur effectuera un prélèvement d’impôt directement sur la rémunération.
Pour ce faire, l’employeur devra se fier au taux d’imposition que lui aura transmis l’administration fiscale.
Cette information sera communiquée via la déclaration sociale nominative (DSN) pour les entreprises du secteur privé.
Dans le secteur public qui n’utilise pas ce système informatique, on parlera de PASRAU (Prélèvement A la Source pour les Revenus Autres).
Chaque mois, l’employeur sera chargé de verser la part retenue au Trésor public.
Etat des lieux des pays ayant mis en place le prélèvement de l’impôt à la source
Sur le continent américain, de nombreux pays ont déjà adopté le prélèvement à la source depuis de nombreuses années.
C’est également le cas pour tous les pays européens depuis de nombreuses années : Allemagne (1925), Danemark (1940), Pays-Bas (1941), Royaume-Uni (1944), Belgique (1962), Luxembourg (1967). Seule la France n’a pas (encore) sauté le pas mais ça n’est plus qu’une question de mois.
Enfin, seize pays africains appliquent le prélèvement de l’impôt à la source depuis plusieurs années, notamment l’Angola, le Sénégal ou encore le Maroc. En Asie et en Océanie, l’Inde, l’Indonésie, le Japon, la Malaisie, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ne font pas exception à la règle.
Quels sont les impacts du prélèvement de l’impôt à la source pour les salariés ?
Chaque année, il faudra que tout salarié continue à déclarer ses revenus
Contrairement aux idées reçues, la déclaration de revenus telle que nous la connaissons va continuer à exister.
Chaque printemps, tout salarié devra remplir ce document.
En revanche, à partir de janvier 2019, tous les contribuables auront l’obligation de la compléter sur Internet. Seules les personnes n’ayant pas d’accès à internet pourront continuer à remplir leur déclaration au format papier.
L’employeur devient collecteur de l’impôt
Avec le prélèvement de l’impôt à la source, l’employeur devient collecteur.
Cependant, inutile pour les salariés de s’inquiéter, seul le taux de prélèvement calculé par l’administration fiscale lui sera communiqué.
En aucun cas il n’aura le détail de la déclaration de revenus des salariés, qu’elle soit individuelle ou commune.
Une nouvelle ligne sur le bulletin de salaire
Sur le premier bulletin de salaire de l’année 2019, tout salarié verra une nouvelle ligne apparaître.
Il s’agira du montant de l’impôt qui sera prélevé sur le salaire.
Chaque mois, cette ligne sera mise à jour et indiquera clairement ce que prélève le Trésor public.
Le choix dans le taux de prélèvement
Si le salarié ne souhaite pas que l’employeur applique un taux de prélèvement personnalisé, c’est-à-dire celui calculé par le Fisc, il peut choisir un taux non personnalisé (ou neutre), déterminé en fonction de la rémunération versée par l’entreprise.
Comment sont calculés les taux de prélèvement de l’impôt à la source ?
Il n’existe pas un mais trois taux de prélèvement différents dans le cadre de l’impôt à la source.
Faisons le point sur leurs différences qu’il faut absolument connaître et assimiler avant de faire le choix.
Un taux personnalisé par défaut
Lorsque le salarié a rempli sa déclaration de revenu sur internet, il a reçu le taux de prélèvement provisoire qui lui sera appliqué dès janvier 2019.
Il s’agit du taux personnalisé puisqu’il tient compte des revenus qu’il a déclarés.
Ce taux a été vérifié par le Trésor public avant d’être officiellement dévoilé sur l’avis d’imposition.
Un taux neutre ou non personnalisé pour garder le secret
Tout salarié ne souhaite pas communiquer le taux d’imposition de son foyer à son employeur, c’est pourquoi il peut choisir le taux neutre ou non personnalisé dans le cadre du prélèvement de l’impôt à la source.
Dans ce cas, ce taux ne tiendra compte que du salaire versé par l’entreprise. En revanche, s’il choisit ce taux neutre, il devra payer la différence d’impôt auprès du Fisc.
A savoir : ce taux dit neutre concerne également les salariés qui entrent sur le marché du travail pour la première fois.
Un taux individualisé pour les couples souhaitant équilibrer leurs impôts
Contrairement au taux personnalisé, le taux individualisé ne concerne que les ménages soumis à l’imposition commune.
Il permet d’individualiser le taux de prélèvement appliqué aux revenus de chaque membre du couple.
Il peut s’avérer très intéressant en cas d’importantes différences de salaires.
Quelles sont les conséquences du prélèvement de l’impôt à la source pour les entreprises ?
Des dépenses importantes mais indispensables
Le prélèvement de l’impôt à la source implique des moyens financiers, logistiques et personnels conséquents pour pouvoir assurer un service fiable et efficace sur le long terme.
Ainsi, la mise à jour des logiciels de fiche de paie peut représenter une somme importante, notamment pour les dirigeants des TPE et PME qui font appel à des prestataires externes pour gérer la partie administrative de leur société.
Un rôle de pédagogue et de relai
L’autre mission essentielle des employeurs dans le cadre du prélèvement de l’impôt à la source consiste à rassurer les salariés.
Il est fort à parier que les bulletins de salaire feront l’objet de nombreuses interrogations quand les employés constateront un revenu net moins élevé qu’à l’habitude.
Cet effet psychologique sera important et les dirigeants vont devoir construire un discours simple, compréhensible et pédagogique.
Pour cela, le Gouvernement propose un kit de communication sur le prélèvement de l’impôt à la source.
Les salariés vont également s’interroger sur le respect de la confidentialité de leurs données.
C’est à vous, en tant que responsable RH ou manager de rappeler que seul le taux de prélèvement est communiqué aux employeurs.
De nouvelles responsabilités des Ressources Humaines
En dehors des échanges réguliers avec l’administration fiscale, les ressources humaines vont devoir s’adapter à leurs nouveaux rôles.
Tout d’abord, elles auront une double responsabilité fiscale et juridique.
Dans le cadre du prélèvement de l’impôt à la source, la collecte de données doit être faite dans les meilleures conditions et dans le respect des règles car en cas de fausse ou de mauvaise déclaration, c’est le DRH qui engage sa responsabilité auprès du Fisc.
Ensuite, tous les employés d’un service RH vont devoir se former à l’utilisation des nouvelles fonctionnalités concernant le calcul de l’impôt à prélever.
C’est à l’employeur de prévoir une période importante de présentation pédagogique de ce nouvel outil de travail.
Enfin, de nombreuses questions subsistent : que se passe-t-il en cas d’acompte sur salaire ? et en cas de liquidation des comptes épargne temps ? Le gouvernement devra apporter les réponses aux interrogations qui vont progressivement se formuler, que ce soit du côté des salariés ou du côté des employés.
Quelles sont les étapes de la mise en place du prélèvement de l’impôt à la source ?
Ayant reçu l’avis d’imposition définitif entre le 23 juillet et le 3 septembre, le salarié avait jusqu’au 15 septembre 2018 pour s’opposer à l’envoi du taux de prélèvement personnalisé à son employeur (cf. paragraphe précédent).
Une entrée en vigueur au 1er janvier 2019
Alors qu’il devait être officiellement mis en place au 1er janvier 2018, le prélèvement de l’impôt à la source entrera en vigueur le 1er janvier 2019, pour tous les salariés des secteurs privé et public.
A compter de ce jour, tous les mois, le montant de votre impôt sera déduit de votre salaire (ou allocation chômage ou pension de retraite pour les personnes concernées).
N’oubliez pas que vous retrouverez ce montant clairement indiqué sur votre bulletin de paie.
Au printemps 2019, vous devrez à nouveau compléter votre déclaration d’impôts sur le revenu, et ainsi de suite chaque année à la même période.
Et l’impôt sur les revenus de l’année 2018 ?
A partir de janvier 2019, le prélèvement de l’impôt à la source implique que tout salarié paiera ses impôts par rapport au salaire qu’il a touché ce même mois.
Fini le décalage d’un an que nous connaissons actuellement !
Dans ce cas, il est légitime de s’interroger sur les impôts des revenus perçus en 2018.
Afin d’éviter un double prélèvement l’année prochaine, un crédit d’impôt appelé « CIMR » sera accordé aux revenus courants perçus en 2018.
En revanche, les autres revenus resteront imposables.
Il s’agit notamment des plus-values mobilières et immobilières, mais également de la prime de départ à la retraite.
Qu’en est-il du prélèvement de l’impôt à la source pour les intérimaires et les salariés ayant plusieurs employeurs ?
Un taux neutre pour les salariés intérimaires
Jusqu’à maintenant, nous avons parlé des salariés en CDI ou en CDD.
Mais qu’en est-il pour les intérimaires qui enchaînent les missions de plusieurs jours, voire semaines, dans différentes entreprises mais dont l’employeur reste l’agence de travail temporaire ?
Le ministère des Finances, conscient que l’administration fiscale ne sera pas en mesure de connaître les salaires des intérimaires et donc de déterminer le taux de prélèvement, un taux non-personnalisé sera appliqué. Il sera alors calculé sur la base du montant de la rémunération versée au travailleur temporaire.
Une régularisation de l’impôt sera faite en septembre 2019.
Un taux pour chaque entreprise en cas de multi-employeurs
Il n’est pas rare qu’un salarié travaille pour plusieurs sociétés.
Dans ce cas, le Trésor public calculera le taux du prélèvement de l’impôt à la source en fonction des déclarations des entreprises et enverra un taux d’imposition à chacune d’entre elles.
Par exemple, pour un salarié qui perçoit 1 000 € dans trois entreprises différentes (3 000 € au total), le taux d’imposition sera donc de 10%. L’administration fiscale communique donc à chaque employeur un taux de 10% à appliquer sur la fiche de paie de l’employé.