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LICENCIEMENT FACEBOOK : Insulter son employeur dans un groupe fermé n’est pas une faute grave

Dans un arrêt du 12 septembre 2018 (n°16-11690), la Cour de cassation a confirmé le caractère sans cause réelle et sérieuse du licenciement pour faute grave notifié à une salariée qui a dénigré son employeur sur son compte Facebook.

La Cour de cassation a considéré que les propos litigieux n’étaient pas fautifs car ils avaient été diffusés à un cercle restreint de 14 personnes et que ces propos avaient en réalité un caractère privé.

 

Les faits

Madame Y, salariée de l’Agence du Palais, gérée par Mme X…, a été engagée le 6 janvier 2004 en qualité de négociatrice immobilier par la société Dupain.

Le 3 mars 2009, elle a été licenciée pour faute grave aux motifs qu’elle avait tenu des propos injurieux et humiliants à l’encontre de son employeur.

La salariée avait adhéré à un groupe sur Facebook, dénommé « Extermination des directrices chieuses ».

Ce groupe Facebook était fermé, accessible uniquement à 14 personnes.

La salariée a saisi la juridiction prud’homale pour contester son licenciement.

La Cour d’appel de Paris a considéré que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

La société s’est pourvue en cassation.

Dans l’arrêt du 12 septembre 2018 (n°16-11690), la Cour de cassation confirme la solution de la Cour d’appel sur le licenciement.

Les Arguments de la Société.

L’employeur faisait grief à l’arrêt de dire le licenciement pour faute grave dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à verser des sommes à la salariée.

La société plaidait que :

  • caractérise une faute grave, la seule diffusion, publique ou privée, par le salarié sur le réseau social Facebook de propos injurieux et humiliants à l’encontre de son employeur ; qu’ayant relevé que Mme Y… avait proféré des propos injurieux et offensants à l’égard de Mme X…, son employeur, et en décidant cependant que ce grief n’est pas constitutif d’une faute grave au motif inopérant que l’employeur n’en démontre pas le caractère public dès lors que les termes litigieux n’étaient accessibles qu’à un groupe fermé de quatorze personnes et étaient donc d’ordre privé, la cour d’appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail,
  • écartant la faute grave sans rechercher, comme elle était invitée à le faire, si ce grief tiré de la diffusion de propos injurieux et offensants à l’égard de l’employeur n’était pas au moins constitutif d’une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1232-1 du code du travail.

La solution de la Cour de cassation.

La Cour de cassation considère que le licenciement pour faute grave est sans cause réelle et sérieuse car les propos litigieux avaient été diffusés à un cercle restreint (14 personnes) et qu’ils avaient un caractère privé.

La Haute juridiction affirme « qu’après avoir constaté que les propos litigieux avaient été diffusés sur le compte ouvert par la salariée sur le site facebook et qu’ils n’avaient été accessibles qu’à des personnes agréées par cette dernière et peu nombreuses, à savoir un groupe fermé composé de quatorze personnes, de sorte qu’ils relevaient d’une conversation de nature privée, la cour d’appel a pu retenir que ces propos ne caractérisaient pas une faute grave » ; « qu’exerçant le pouvoir qu’elle tient de l’article L. 1235-1 du code du travail, elle a décidé que le grief ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement ».

Ce qu’il faut retenir de la décision – Salariés : paramétrez votre compte Facebook en confidentiel !

Les salariés, utilisateurs de Facebook doivent s’assurer à restreindre la diffusion de leurs messages en utilisant un paramétrage de confidentialité.

A défaut, ils s’exposent à ce que leurs propos tenus sur Facebook, soient utilisés par leur employeur pour justifier un licenciement.

Dans un arrêt du 24 mars 2014, la Cour d’appel de Lyon a considéré comme une cause réelle et sérieuse les propos injurieux d’un salarié sur un mur Facebook en accès libre.

De même, si un message litigieux n’a pas été diffusé dans une sphère privée d’échanges car le salarié possède beaucoup d’amis, le licenciement (pour propos injurieux) pourrait être validé.

Même si le contexte est totalement différent, il faut rapprocher l’arrêt du 12 septembre 2018 de l’arrêt du 20 décembre 2017, n° 16-19609 aux termes duquel un employeur avait été condamné pour violation de la vie privée pour avoir utilisé une publication Facebook d’un salarié devant le Conseil de prud’hommes.

La Cour d’appel d’Aix en Provence avait en effet écarté des débats un procès-verbal d’huissier qui rapportait des informations extraites du compte Facebook d’une salariée obtenues à partir du téléphone portable d’un autre salarié.

Dans cette espèce, l’employeur remettait en cause l’état dépressif dont faisait état une salariée en produisant un procès-verbal d’huissier qui rapportait des informations de son compte Facebook auquel l’employeur n’avait pas un accès autorisé et dont il a eu connaissance à partir du téléphone portable d’un autre salarié.

Confirmant l’arrêt de la Cour d’appel, la Cour de cassation a affirmé que « le procès-verbal de constat d’huissier établi le 28 mars 2012 à la demande de la société rapportait des informations extraites du compte Facebook de la salariée obtenues à partir du téléphone portable d’un autre salarié, informations réservées aux personnes autorisées », la Cour d’appel a pu en déduire que l’employeur ne pouvait y accéder sans porter une atteinte disproportionnée et déloyale à la vie privée de la salariée ».

Cass. Soc., 12 septembre 2018, n°16-11690

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