Il y a quelques mois, les juridictions du fond avaient, pour la première fois à notre connaissance, reconnu qu’un télétravailleur pouvait être victime d’un choc émotif à réception de trois courriels lui demandant de réaliser un travail complexe, ne relevant pas directement de son champ de compétences.
En effet, avait été retenu :
- que le choc émotionnel avait pu être vérifié via l’application Teams par le délégué syndical,
- que l’incident s’était bien déroulé au lieu du domicile du télétravailleur et durant la plage horaire de télétravail.
C’est dans ce contexte que deux Cours d’Appel ont été conduites, dans deux nouvelles espèces, à conforter et clarifier les règles applicables au télétravail.
Dans la première espèce, un salarié, qui avait débuté son activité en télétravail, a perçu « un choc métallique » à l’extérieur du domicile, entraînant une interruption de sa connexion internet.
S’étant rendu sur la voie publique, et alors qu’il s’entretenait avec le chauffeur du camion qui venait de heurter un poteau téléphonique, le salarié a été victime de lésions physiques, ledit poteau ayant finalement cédé fortuitement.
La Cour d’Appel de Saint-Denis de la Réunion considère :
- que la lésion physique est survenue hors du domicile du salarié et donc hors du lieu de télétravail,
- que la présomption d’imputabilité de la lésion au travail ne peut donc être invoquée par le salarié,
- que ce dernier doit prouver le lien de causalité entre la lésion et le travail, preuve qui n’est pas rapportée, la recherche de la cause d’une panne de connexion n’entrant pas dans ses attributions.
Ce faisant, la Cour applique la jurisprudence déjà dégagée en la matière, liée à l’interruption de l’activité ou des missions professionnelles, à la situation du télétravail.
Dans une seconde espèce, une salariée, qui avait terminé sa plage horaire de télétravail en ayant « dépointé » à distance, a été victime dans les minutes suivantes d’une chute dans les escaliers, en regagnant le premier étage de son domicile.
La Cour d’Appel d’Amiens considère :
- que la lésion est survenue hors du temps de travail,
- que dès lors, la présomption d’imputabilité ne peut être invoquée,
- que le lien entre la lésion et le travail n’est pas davantage rapporté, appliquant la jurisprudence déjà dégagée en pareille situation, soit lorsque le salarié a quitté définitivement l’enceinte de l’entreprise, sans avoir à effectuer des tâches ou des missions professionnelles connexes ou adjacentes.
En synthèse, ces premières décisions enseignent :
- que le corpus juridique dégagé et afférent aux accidents du travail est transposable à la situation du télétravailleur,
- que cette situation particulière invite néanmoins l’employeur à « décortiquer » factuellement la scène accidentelle, aucune prise en charge d’un accident, au titre de la législation du travail, n’étant en réalité et évidemment de droit.
https://www.courdecassation.fr/decision/645c89649925b3d0f8f8f6a5
https://www.courdecassation.fr/decision/648bfe615bba4e05dbabc0ef