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LE STATUT DE LANCEUR D’ALERTES EN MATIÈRE DE PROPOS ANTISYNDICAUX

Les propos antisyndicaux font partie de ceux que peut dénoncer un lanceur d’alerte selon son statut mis en place par la loi Sapin 2, même si celui-ci n’est que consultant.

La loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite loi Sapin 2, crée un régime de protection pour les lanceurs d’alerte.

L’article 6 de la loi définit le lanceur d’alerte comme :

« Une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice graves pour l’intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance. »

 

Le statut de lanceur d’alerte reconnu en matière de propos antisyndicaux

A l’occasion d’un arrêt rendu le 27 février 2018, la Cour d’appel de Versailles a reconnu le statut de lanceur d’alerte à un employé ayant permis la diffusion de propos antisyndicaux tenus par son employeur.

En l’espèce, l’employé, intervenant en tant que consultant, a contacté des syndicats pour leur demander d’organiser la projection du film « Merci patron » dans les locaux de l’entreprise pour laquelle il intervenait.

A la suite de cela, son employeur lui a donné un avertissement, lui signifiant qu’il pouvait faire l’objet de sanction disciplinaire et il lui a interdit de prendre contact avec les syndicats en raison de son statut de consultant.

Au cours de cet échange, l’employeur a également tenu des propos déplacés envers les syndicats.

L’employé ayant enregistré les propos tenus à l’occasion de cet entretien les a communiqués à un journal qui les a par la suite diffusés.

L’employeur l’a de nouveau convoqué pour le licencier pour faute grave en raison de l’enregistrement et de la diffusion de ses propos.

La Cour d’appel de Versailles a retenu que l’interdiction faite au salarié de prendre contact avec les syndicats constitue une atteinte à la liberté syndicale et reconnait le statut de lanceur d’alerte au salarié.

La Cour d’appel de Versailles dénonce « des faits d’atteinte à la liberté d’expression dans le cadre d’échanges avec un syndicat ».« En application du droit à l’information syndicale et au principe de libre détermination du contenu des communications syndicales, il ne peut être reproché à Monsieur B. d’avoir utilisé l’adresse électronique personnelle professionnelle de deux représentants d’un syndicat au sein du TCR ».

Elle reconnait que le salarié à personnellement eu connaissance de fait constituant un manquement à une loi ou un règlement et a rendu les propos de son employeur publics « en raison de sa crainte de faire l’objet de manière injustifiée d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement ».

Le licenciement de l’employé a ainsi été déclaré nul.

 

La possibilité de divulguer l’alerte

Conformément à l’article 8 de la loi Sapin 2, le signalement d’une alerte doit, dans un premier temps, être porté à la connaissance de l’employeur.

En l’absence de diligence de sa part, l’alerte est adressée à l’autorité judiciaire, à l’autorité administrative ou aux ordres professionnels, lesquels ont trois mois pour la traiter.

A défaut et en dernier ressort, l’alerte peut être rendue publique.

Enfin, en cas de danger grave et imminent ou en présence d’un risque de dommages irréversibles, le signalement peut directement être rendu public.

Dans l’arrêt de la Cour d’appel du 27 février 2018, c’est le risque de licenciement qui constitue un danger grave et imminent pour le lanceur d’alerte.

C’est la raison pour laquelle les juges ont accordé le bénéfice du statut de lanceur d’alerte à l’employé qui a rendu publique l’alerte sur les propos antisyndicaux en question.

 

La qualité de lanceur d’alerte reconnu à un consultant

La Cour d’appel a reconnu la qualité de lanceur d’alerte à l’employé agissant en tant que consultant pour l’entreprise mise en cause.

En effet, le paragraphe III de l’article 8 de loi Sapin 2 fait référence au personnel et aux collaborateurs extérieurs ou occasionnels.

Le collaborateur extérieur peut être entendu comme une personne qui, bien qu’employés par une autre entité que celle auprès ou pour le compte de laquelle il exerce ses fonctions, dispose d’une connaissance approfondie du fonctionnement de cette dernière.

A ce titre, au sens de la loi Sapin 2 et au vu de l’arrêt de la Cour d’appel du 27 février 2018, un consultant est un collaborateur extérieur.

Par un arrêt du 27 février 2018, la cour d’appel de Versailles a accordé le bénéfice du statut de lanceur d’alerte à un salarié ayant enregistré et transmis à un journal les propos inamicaux envers les syndicats et attentatoires à la liberté d’expression des salariés, tenus par un supérieur dans le cadre d’un entretien informel.

Le salarié avait, dans un premier temps, reçu un avertissement après avoir contacté par courriel des syndicats du Technocentre de Guyancourt pour les convier à une manifestation contre la loi Travail.

Il avait ensuite été licencié pour avoir laissé diffuser par le journal Fakir les propos de son directeur lui interdisant de contacter les syndicats.

La cour d’appel juge que le licenciement du salarié est nul car attentatoire à la liberté d’expression.

La loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique dite « Loi Sapin II » est venue poser un cadre général au statut de lanceur d’alerte en droit français.

L’article 6 de la loi « Sapin II » définit le lanceur d’alerte comme une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice graves pour l’intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance.

Dans cette affaire, un consultant employé par la société EURODECISION, en mission auprès du Technocentre Renault de Guyancourt, avait pris l’initiative de convier les syndicats du site à la « nuit rouge » organisée par le journal Fakir dans le prolongement d’une manifestation contre la loi Travail.

Son employeur, informé de cet envoi, convie alors le salarié à un entretien informel, suivi d’un entretien préalable à l’issue duquel un avertissement lui sera infligé.

Par la suite, le journal Fakir, dont le consultant est bénévole, a diffusé son enregistrement de l’entretien « informel » avec son directeur.

Ce dernier y affirme notamment que les mails des syndicalistes du site de Renault sont surveillés, et qu’il n’est pas « censé, en tant qu’intervenant chez Renault […] discuter avec les syndicats Renault », qui sont « là pour les salariés de Renault ».

Dans la foulée de la publication de cet enregistrement, le consultant est convoqué à un nouvel entretien préalable et licencié pour faute grave, l’employeur lui reprochant « un manquement grave à ses obligations de loyauté et de bonne foi ».

Le salarié, qui estime que son licenciement est intervenu en violation de la protection des lanceurs d’alerte prévue par la loi, saisit la justice pour faire juger son licenciement comme nul.

Il conteste en outre l’interdiction qui lui était faite de communiquer avec les syndicats de l’entreprise d’accueil, en faisant valoir qu’il fait partie de la communauté de travail du Technocentre.

Saisie du litige, la cour d’appel de Versailles retient en premier lieu que l’interdiction faite au salarié, membre de la communauté de travail, de communiquer avec les syndicats de l’entreprise d’accueil constitue une atteinte à la liberté syndicale, « qui dérive du droit fondamental à la liberté d’expression ».

Elle relève que les mails litigieux, envoyés à deux syndicalistes, avaient un « lien direct » avec les droits des salariés étant donné « l’objet de la manifestation » contre la loi Travail, et ne « mettaient pas en cause la société Renault ».

La cour d’appel observe que « la révélation des faits d’atteinte à la liberté d’expression dans le cadre d’échanges avec un syndicat est intervenue par la voie de médias par internet, lors de la diffusion de l’enregistrement litigieux ».

Le salarié « avait personnellement et préalablement constaté que son employeur remettait en cause plus généralement son droit à la libre communication avec les syndicats de la société Renault, au vu des propos tenus par le dirigeant de la société Eurodécision lors de l’entretien informel » et « de la procédure disciplinaire avec mise à pied conservatoire » débouchant sur un avertissement puis son licenciement pour faute grave.

Selon la cour d’appel, le salarié est dès lors recevable à invoquer le statut du lanceur d’alerte.

Elle précise sur ce point que si le salarié « a laissé diffuser l’enregistrement », c’est « en raison de sa crainte de faire l’objet de manière injustifiée d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement », justifiée par sa convocation à un entretien préalable.

Cour d’appel de Versailles, 27 février 2018, n°16/04357

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