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Le vol commis par un steward lors d’une escale se rattache à sa vie professionnelle et justifie son licenciement fautif

vol d'un steward

En principe, un fait commis dans le cadre de la vie privée du salarié n’est pas fautif dans la relation de travail.

Il ne peut donc pas servir de fondement à un licenciement disciplinaire (Cass. Soc. 16 décembre 1997, n° 95-41.326 ; Cass. Soc. 19 décembre 2007, n° 06-41.731 ; Cass. Soc. 23 juin 2009, n° 07-45.256) mais si les faits commis hors du temps et du lieu de travail sont en lien avec le travail, soit parce qu’ils se rattachent à la vie professionnelle du salarié, soit parce qu’ils caractérisent un manquement à une obligation découlant du contrat de travail, ils peuvent constituer une faute et justifier un licenciement disciplinaire (Cass. Soc. 3 mai 2011, n° 09-67.464).

Il convient de noter qu’un fait de la vie personnelle du salarié peut aussi justifier un licenciement non disciplinaire s’il a occasionné un trouble dans l’entreprise (CA Dijon, 9 septembre 2004, n° 03-858 ; Cass. Soc. 9 mars 2011, n° 09-42.150).

Un arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de cassation du 8 juillet 2020 vient donner une nouvelle illustration à propos d’un vol commis par un steward lors d’une escale.

En l’espèce, un steward d’une compagnie aérienne a été licencié pour faute grave aux motifs d’avoir manqué à ses obligations professionnelles et porté atteinte à l’image de la compagnie en ayant dérobé, lors d’une escale, le portefeuille d’un client de l’hôtel dans lequel il séjournait en tant que membre d’équipage.

Confondu grâce aux images de vidéosurveillance de l’hôtel, il a admis avoir dérobé le portefeuille oublié par un client au comptoir de l’hôtel, s’être emparé des 1 800 dollars se trouvant à l’intérieur puis avoir jeté le portefeuille, retrouvé ultérieurement dans les toilettes mais, estimant que les faits reprochés relevaient de sa vie privée car ayant été commis en dehors du temps et du lieu de travail, il a contesté son licenciement devant le Conseil de Prud’hommes.

La Cour d’appel avait rejeté l’argument, jugeant que plusieurs circonstances suffisaient à rattacher les faits reprochés à la vie professionnelle du salarié.

Elle avait relevé en effet que :

  • les faits de vol ont été commis dans un hôtel partenaire commercial de l’employeur, qui y avait réservé à ses frais les chambres pour les membres de l’équipe navigante dans laquelle le salarié était affecté,
  • l’hôtel avait signalé le vol à la société employeur et identifié son auteur comme étant un salarié de cette société,
  • c’est en raison de l’intervention de l’employeur que la victime n’avait pas porté plainte.

Cette analyse a été confirmée par la Chambre Sociale de la Cour de cassation qui a repris, dans son attendu, l’énumération des circonstances relevées par la Cour d’appel.

Après avoir établi le lien entre les faits de vol commis par le salarié et la sphère professionnelle, la Cour d’appel avait considéré que les faits étaient constitutifs d’une faute grave.

Il convient de noter qu’en matière de faute grave, la Cour de cassation limite son contrôle aux erreurs manifestes de qualification des faits fautifs commises par les juges du fond.

Elle vérifie ainsi que les éléments de la faute grave ont été caractérisés par les juges.

Sur ce point, la Cour de cassation valide l’analyse de la Cour d’appel.

D’une part, elle constate que la faute, telle qu’énoncée dans la lettre de licenciement, est caractérisée.

En commettant un vol au préjudice d’un client d’un hôtel partenaire, le salarié avait en effet manqué à ses obligations professionnelles qui résultaient non seulement de son contrat de travail mais également du règlement intérieur de la société.

D’autre part, la Cour d’appel juge que la faute était d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement immédiat du salarié.

Elle relève plusieurs éléments en ce sens :

  • si les faits reprochés, susceptibles de recevoir une qualification pénale, n’ont pas fait l’objet d’une procédure pénale, c’est en raison de l’intervention de l’employeur, le client ayant en effet conditionné le non-dépôt d’une plainte à une réaction rapide de la société employeur,
  • le salarié n’a pas reconnu spontanément les faits et ce n’est qu’après avoir consulté son dossier disciplinaire qu’il les a admis, après les avoir contestés dans un premier temps,
  • il n’a pas non plus spontanément et immédiatement procédé au virement bancaire de la somme volée dans le portefeuille.

En l’espèce, ont été écartées comme circonstances atténuantes l’ancienneté du salarié (14 ans) et l’absence de passé disciplinaire.

Il convient de rappeler qu’il est généralement admis par la jurisprudence de la Cour de cassation que le vol commis par un salarié en dehors de l’entreprise, notamment au préjudice d’un client, caractérise une faute grave, alors même que l’objet soustrait est de faible valeur et que le salarié, auquel le manquement isolé est reproché, a une ancienneté importante et n’a fait l’objet d’aucun reproche antérieur (Cass. Soc. 16 janvier 2007, n° 04-47.051 ; Cass. Soc. 28 mars 2012, n° 11-11.981).

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